Congrès · Parti Vert Européen
Publié le 2 févr. 2024
Chers amis, chères amies,
Je suis heureuse et fière d'intervenir devant vous, ici à Lyon et devant la famille verte européenne.
Je veux saluer la co-présidente du PVE dont je connais l'engagement européen et la ténacité. Elle est de cette génération de femmes, qui en s'affirmant, bousculent la politique européenne.
Merci à toi pour ton énergie et ta constance Mélanie Vogel.
Et merci à chacun et chacune d'entre vous ici présents.
Parce que c'est ensemble que nous sommes une force puissante.
Je sais que nous avons nos différences et parfois nos divergences.
Mais je sais aussi que partout en Europe, et ailleurs, celles et ceux qui portent le drapeau vert, agissent pour qu'un monde nouveau voie le jour.
Nous sommes les gardiennes et les gardiens du vivant et nous devons être les défenseuses et les défenseurs de la justice.
Voilà la raison pour laquelle, dans le mouvement des agriculteurs qui secoue le pays, nous avons choisi de les soutenir. Nous refusons le piège tendu par les démagogues qui consiste à opposer les écologistes et le monde paysan.
Notre écologie est l'alliée du monde paysan parce que nous sommes les seuls à vouloir faire face aux enjeux du dérèglement climatique et assurer un revenu digne à celles et ceux qui vivent du travail de la terre.
Ce n'est pas par hasard si notre autre coprésident du PVE est agriculteur, et je veux à son tour le saluer chaleureusement : Thomas Waitz.
Les liens entre celles et ceux qui travaillent la terre et celles et ceux qui veulent la protéger sont anciens.
Comment ne pas voir aujourd'hui que les paysannes et les paysans sont au plus près des ravages du dérèglement climatique ?
Un coup de gel et la récolte est perdue. Une sécheresse et la saison est gâchée. Un virus, et tout est à abandonner.
Rien de nouveau sous le soleil affirment les climatosceptiques.
Ils mentent.
Depuis toujours les aléas climatiques frappent les agriculteurs.
Mais désormais le dérèglement accentue l'imprévisibilité, et les épisodes météorologiques extrêmes livrent comme jamais le monde paysan à une forme de précarité climatique.
Voilà la vérité !
Qui d'autre que les écologistes a alerté des catastrophes environnementales en cours?
La crise que nous vivons est depuis longtemps connue : mais des forces puissantes ont choisi de la taire, de la masquer, de la nier.
Les lobbies ont tout fait pour cacher cette vérité. Tout fait pour influencer les politiques publiques, et tout fait pour prolonger un modèle basé sur la domination, l'accumulation, la prédation, et pour finir, la destruction.
Alors nous avons dû gagner chaque centimètre de vérité, en nous appuyant sur la parole des scientifiques, quand les lobbies utilisaient la puissance de l'argent pour acheter les consciences et répandre une pluie continue de mensonges sur nos sociétés.
Le combat n'est pas fini. La bataille se fait même plus intense encore.
Quand des hordes haineuses, se déclenchent sur les réseaux sociaux pour harceler les spécialistes du climat, et pour intimider les défenseuses et défenseurs de l'environnement, on mesure bien que c'est une guerre contre la raison qui est engagée par les climatosceptiques.
Amis des fake news et des lobbies, laissez-moi vous dire ceci: vous ne nous faîtes pas peur, et nous autres écologistes, nous allons continuer à dire la vérité, contre vents et marées.
Notre détermination sera plus grande que la vôtre.
Vous défendez l'argent, nous défendons les gens.
Vous défendez le système, nous défendons les écosystèmes.
Et aujourd'hui, à cette tribune je veux le dire, nous défendons les agriculteurs.
Je me bats pour des normes écologiques et sociales exigeantes. Mais si dans le même temps on favorise des exportations venues de pays ou ces règles ne s'appliquent pas, c'est suicidaire.
Nous refusons les accords de libre-échange qui soumettent nos agriculteurs à une concurrence déloyale et détruisent peu à peu l'agriculture européenne.
Nous en avons assez du double discours de celles et ceux qui disent soutenir les agriculteurs mais votent pour les traités qui les étranglent en les soumettant à une concurrence injuste.
Comment prétendre défendre l'agriculture en défendant le statu quo d'un système qui marche sur la tête?
Il faut absolument une refonte globale du système agricole qui permette aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail,
qui permette à l’Europe d'assurer sa souveraineté alimentaire,
et qui garantisse à chacune et chacun le droit à une alimentation saine.
Aujourd'hui, la PAC privilégie systématiquement les exploitations industrielles et pousse à la mise en concurrence entre les pays de l'Union, avec une nette préférence pour le moins-disant social et environnemental.
80% des subventions européennes vont aux 20% des plus grosses exploitations. Et on voudrait nous faire croire que c'est la réglementation environnementale le problème ?!
C'est le système dans son ensemble qui doit être revu et non seulement corrigé à la marge.
Il faut donc une autre PAC, et nous les écologistes la demandons depuis des années.
Nous avons besoin d'un nouveau pacte entre la société et celles et ceux qui la nourrissent.
C’est ce que nous ont dit Marie Pochon et Benoit Biteau, que je remercie pour leur travail acharné.
L'indispensable transformation de notre modèle agricole nous concerne toutes et tous en tant que citoyens et consommateurs.
Le moment de crise que nous traversons doit être l'occasion de remettre les choses à plat.
La PAC est le premier budget de l'union: donc demander une autre PAC c’est forcément demander une autre Europe.
Soyons clair: les enjeux de transition écologique sont tels qu'elle ne sera pas indolore: faire pivoter un système basé sur la production à tout prix, vers une logique visant à réencastrer l'économie dans les limites planétaires, demande une réorganisation en profondeur de nos modèles.
Je veux aussi évidemment, parler des toxiques. On a enfermé les agriculteurs dans un système qui les a rendus dépendants, aux pesticides comme aux engrais chimiques. L’addiction de notre modèle agricole aux toxiques est telle qu'en sortir est très difficile.
Raison de plus pour engager cette sortie avec courage et détermination plutôt que de céder à la moindre bourrasque ainsi que l’a fait le gouvernement français.
Mais si on ne prend pas en compte la précarité grandissante du milieu agricole, la charge mentale qui rend dingue, la pression financière qui écrase, on n'y arrivera pas.
Il faut profiter de cette crise pour refonder le pacte agricole : soutien à l'agriculture et engagement pour le renouvellement des générations agricoles en contrepartie de la transformation de notre modèle.
La question c'est : la société est-elle prête à en payer le prix, ou choisit elle d'abandonner ses agriculteurs?
Je le dis clairement, la colère qu'expriment aujourd'hui nos agriculteurs est on ne peut plus légitime. Mais, si cette colère est légitime, les cibles vers lesquelles on s'efforce de la diriger ne sont pas les bonnes.
Je dis donc aux paysans: nous menons le même combat, ne vous trompez pas de colère.
Partout en Europe, des populistes de droite et d'extrême-droite espèrent capitaliser sur le désespoir du monde paysan pour mieux torpiller le pacte vert et les écologistes.
L’extrême droite a deux ennemis: l'étranger qu'elle accuse de tous les maux, et l'écologie qu'elle accuse de tous les reculs.
Nous proposons une Europe des droits humains et de de l'écologie. L’extrême droite défend une Europe des barbelés et des pesticides.
Voilà le grand clivage de ces élections européennes. Plus ou moins d'écologie? Plus ou moins de droits humains? Voilà l'enjeu.
Voilà pourquoi les élections européennes à venir sont un rendez-vous majeur dans l'histoire de notre famille politique, mais aussi dans l'histoire de l'Union européenne.
Si on veut sauver le climat, si on a compris que l'urgence écologique n'était pas négociable, si on a compris que l'avenir du monde en dépendait, alors en juin prochain, il faut tout faire pour envoyer le maximum de parlementaires verts se battre dans les institutions.
C’est simple : si nous ne sommes pas en mesure d’envoyer siéger une force écologiste puissante lors de la prochaine mandature, alors le Green Deal est condamné.
Chaque voix va compter. Chaque vote va peser.
D'autant plus que l’extrême droite trouve des alliés objectifs dans sa lutte contre l'écologie.
En France, dans un discours de politique générale dont chaque mot était imbibé de démagogie, le premier ministre Gabriel Attal a opposé le peuple et l'écologie.
Il a osé le faire, alors même que tout son discours de politique générale est la preuve de son indifférence à la misère et de son dégoût des pauvres, qu'il stigmatise sans prononcer leur nom quand il oppose la France qui travaille à celle qui touche le revenu de solidarité active, qui est notre revenu minimum garanti.
Au nom de la bonne gestion des finances publiques, le gouvernement traque les plus pauvres, leur demande en permanence de rendre des comptes.
Pour Macron et Attal, le pauvre, c'est toujours celui qu'il faut sermonner, remettre dans le droit chemin, contrôler.
Alors oui, nous n'accepterons jamais de prendre des leçons d'écologie de la part de ceux qui ne connaissent rien au peuple et rien à l'écologie.
L'écologie que nous défendons ne sépare pas les combats sociaux des combats environnementaux, car depuis longtemps nous avons compris que c'est le même système qui exploite sans vergogne les plus humbles et détruit sans limite la nature.
Il n'y a pas d'un côté les injustices environnementales et d'un autre l'injustice sociale.
Ce sont les deux faces d'un même système d'oppression et de destruction.
Ce système monsieur le premier ministre, vous le défendez, et nous nous le combattons.
En opposant le peuple et l'écologie, vous montrez que vous êtes en réalité l'ennemi de l'un et de l'autre.
Amis journalistes, présents dans la salle, j'insiste auprès de vous pour que vous preniez note.
Mon écologie ne fait pas la leçon aux pauvres : elle apprend d'eux, se déploie à partir d'eux, s'appuie sur les inégalités qu'ils subissent pour remettre en cause le désordre écologique et social du monde.
L'enjeu est planétaire. On ne construit pas l'écologie dans un seul pays. Il nous faut des règles globales pour faire face à des menaces globales.
L'écologie demande de poser des limites à l'appétit jamais rassasié des multinationales, par exemple celles des fossiles ou de l'agroalimentaire, dont la prospérité est basée sur une domination sans partage sur la nature.
Et pour cela, il convient d'agir à la bonne échelle. Et la bonne échelle, c'est l'Europe. Évidemment c'est l’Europe.
Oui, nous les écologistes pensons que l’Europe est la solution.
Je sais que l’Europe n’est pas parfaite: elle a trop cédé au marché et pas assez garanti un idéal de justice.
Mais elle mérite d’être défendue à l’heure où elle est menacée par la montée du national populisme, de l’illibéralisme, des égoïsmes, du désespoir.
Et si nous ne voulons pas qu'elle soit un problème, nous devons la transformer.
C'est la raison pour laquelle nous refusons un retour au pacte de stabilité tel que nous l'avons connu, avec des critères si rigides qu'ils empêchent de fait l'évolution de notre modèle, en cadenassant les possibilités d'investissement dans la transition écologique juste que nous défendons.
L'austérité n'est pas la politique dont nous avons besoin.
Il nous faut nous battre pour que le tout marché ne soit pas la ligne d’horizon du projet de l’Union européenne,
qui n’a pas été initialement construite pour offrir des bénéfices infinis à une poignée d’actionnaires,
mais pour que les peuples du continent qui avaient tant souffert des déchirements des guerres retrouvent paix et prospérité.
Je le répète, l'Europe doit changer de boussole. Notre boussole c'est la sauvegarde du climat et la justice sociale.
J’ai proposé un droit de veto social garantissant les droits sociaux des 10% d'européens les plus pauvres en interdisant de prendre toute mesure qui viendrait dégrader leur situation.
C'est un basculement systémique qui renverse l'ordre des priorités en mettant au premier plan le soin des plus démunis.
L’Europe doit aussi être l’épicentre de la bataille pour le vivant. Il faut engager la sortie de la civilisation des toxiques, reconnaître les droits de la nature, et adopter un traité environnemental qui fasse de la protection du vivant la règle des règles.
J'arrive au terme de mon discours. J’aurais voulu parler en détail du climat, mais il faut conclure, provisoirement.
J’invite chacune et chacun à lire et relire les rapports du GIEC et vous comprendrez ceci:
Les questions soulevées par les écologistes sont des questions de civilisation qui engagent la survie de l'humanité telle que nous la connaissons.
Et dans cette campagne, au fond le choix est entre l'écologie comme chemin de sauvegarde et la barbarie d’une régression généralisée sur des bases nationales-populistes.
C'est un affrontement entre l'intérêt général du genre humain et les forces de l'égoïsme et de la destruction.
Nous ne voulons pas vivre dans un monde détruit.
Nous ne pourrons pas vivre dans un monde défait...
Alors à celles et ceux qui doutent, qui se disent "mais comment allons-nous y arriver, "je veux dire aujourd'hui, "tenez bon" !
Vous êtes les éclaireurs du futur, vous êtes une raison d'espérer dans un monde qui chancelle.
Ne perdez pas courage. Ne baissez pas las bras, ne baissez pas la tête, et ne baissez pas les yeux. Si vous soutenez assez longtemps le regard de nos détracteurs, alors vous lirez dans leurs yeux la peur de perdre leurs positions acquises.
Ils savent au fond que nous vivons un moment de bascule.
Ils savent que les consciences endormies se réveillent enfin.
Ils savent que l'écologie est une force inarrêtable parce qu'elle est du côté de la vie, du côté de la justice, du côté de l'essentiel.
Alors chers amis ne laissez pas le poison du découragement s'instiller dans vos veines et faisons ensemble des élections européennes à venir un succès par la force de notre mobilisation.
Voilà l'enjeu de la campagne, voilà l'enjeu de la période, voilà le sens du combat que nous menons ensemble.
Vive l'Europe, et vive l'écologie.