Tout le monde doit se rendre compte que quelque chose ne tourne pas rond
dans le système actuel : on empêche les agriculteurs et agricultrices de vivre dignement de
leur travail, on les met en concurrence avec le monde entier, la grande
distribution et l’industrie se taillent la part du lion avec des marges de
plus en plus importantes, l'inflation des produits alimentaires pèse sur
les conditions de vie de celles et ceux qui avaient déjà du mal à joindre
les deux bouts, la qualité de l'alimentation baisse, plus particulièrement
pour les plus pauvres et, d'un autre côté, on voit que le gaspillage
alimentaire continue.
L’agriculture subit le plus grand plan social depuis des années : le
nombre d'exploitations agricoles dans l’UE a diminué de 40% entre 2003 et
2020 passant de 15 à 9 millions. Les subventions sont mal dirigées et les
petites exploitations sont délaissées au profit de l’agrobusiness pour qui
les performances financières et les coûts les plus bas sont les seuls
objectifs. Les conditions de vie, les revenus, l’accompagnement et la
protection accordée à nos éleveur·euse·s, agriculteur·ice·s sont
dramatiques. Il est urgent de sortir de cette situation délétère. Il est
urgent, aussi, de prendre des mesures qui leur assure une visibilité à
long terme, pour leur permettre d’engager la transition sans peur de
perdre leurs revenus.
La transition ne peut reposer uniquement sur celles et ceux qui produisent.
La transition écologique de l'agriculture doit s'accompagner d'une
transition de notre alimentation. Plus largement, cette transition doit
être celle de l'ensemble des filières agricoles et impliquer tous leurs
acteurs, de l'amont jusqu'en aval. Les politiques agricoles et
alimentaires devront accompagner les transformations de ces secteurs,
les mobiliser et les encadrer. Pour garantir la souveraineté
alimentaire, l'Union européenne doit se doter d'une vraie démocratie
alimentaire.
C’est comme ça que nous pourrons avoir des productions
de qualité. L’alimentation est l’affaire de tous et toutes, la politique
agricole que nous mettons en place doit également impliquer largement
l’ensemble des citoyens et citoyennes. Dans cette lutte, les Écologistes et
agriculteur·ice·s poursuivent les mêmes objectifs, avec les mêmes exigences.
Nos mesures :
Une politique agricole juste et rémunératrice, qui permette à tous·tes
les paysan·ne·s de vivre dignement de leur travail :
-
Mettre en place une PAC qui soutient l’emploi avec des
subventions distribuées par unité de main-d'œuvre. Plutôt que de
financer des hectares, la politique agricole commune finance les
pratiques agricoles qui créent de l’emploi.
-
Réintroduire des outils permettant la régulation par les prix,
avec des prix planchers qui garantissent d'être au moins payé au prix de production.
-
Mettre en place un EGALIM européen
pour renforcer les capacités de négociation des paysan·ne·s sur les prix,
contenir et redistribuer les marges des transformateurs et de
l’agro-industrie, lutter contre la concurrence intra-européenne et
favoriser les circuits courts.
-
Fixer à la restauration collective des objectifs de produits
végétaux, bio et locaux, tout en adaptant les règles européennes de la commande publique qui
aujourd’hui ne permettent pas de mettre “local” dans un cahier des
charges d’appel d’offres. Les commandes intérieures doivent soutenir ces
objectifs de transformation agroalimentaire.
-
Diminuer les taxes sur certains produits comme les fruits et légumes
et le bio, pour que les prix soient aussi cohérents avec le schéma alimentaire
que nous souhaitons favoriser. Voir notre proposition d’instaurer une
TVA verte (cf II.B.1. Mettre la politique économique au service de la transition).
-
Sortir
des accords de libre-échange pour produire en Europe ce dont nous
avons besoin :
-
Instaurer un principe de subsidiarité commerciale pour chercher à ne
plus importer ce que l’on produit, ni exporter ce que les autres
peuvent produire ;
-
Introduire des mesures-miroirs sur l’ensemble des réglementations
sociales et écologiques européennes ;
-
Proposer une réforme ambitieuse de l’OMC qui permette de faire reposer
le multilatéralisme non plus sur des logiques purement marchandes mais
sur les droits humains et environnementaux notamment la souveraineté
alimentaire (cf VIII.B. L’Union européenne, actrice de la paix
dans le monde) ;
-
Protéger les paysan·ne·s des nouveaux risques
avec l’assurance européenne face aux
risques climatiques
(cf VI.A.2. Assurer l'accessibilité des besoins essentiels pour tous·tes) et épidémiques.
Un plan pour accompagner et inciter à la transition agricole vers des
pratiques plus écologiques:
-
Assurer la viabilité économique de ce nouveau modèle agricole :
-
Garantir une visibilité des revenus sur trois ans pour les
agriculteur·ice·s s’engageant dans la transition de leurs
pratiques,
notamment concernant la conversion en agriculture biologique ;
- Mettre en place un Fonds de transition agricole permettant d’accompagner les paysan·ne·s dans leurs investissements pour des pratiques agro-écologiques, en particulier lors de la transmission des activités ;
-
Faciliter l’installation et la pérennisation en
soutenant la mise en place d’un mécanisme de dotation (de
carrière)
où les paysan·ne·s qui s’installent en agro-écologie, ou convertissent
leur exploitation, sont doté·e·s par un collectif citoyen et/ou par les
collectivités d’une partie des moyens de production (ferme, terre,
machine, bétail, etc). Mettre en place une Dotation Nouvelle
Installation sans critère d'âge et ouverte aux salarié·e·s-associé·e·s des
SCIC et SCOP pour favoriser toutes les installations agricoles ;
-
Rémunérer les bonnes pratiques écologiques, respectueuses du
bien-être animal. Développer le paiement pour la protection des services
écosystémiques pour la durabilité de la transition, en particulier en
systématisant l'aide au maintien pour l'agriculture biologique ;
-
Développer de nouvelles filières pour la transition écologique grâce à
une politique européenne volontariste :
-
Organiser la mise en réseau et son animation, le financement de la
recherche et le soutien à l’investissement pour permettre la
diversification des productions, le développement des protéines
végétales, le soutien à la filière bio, la transformation des filières
en ralentissement ;
-
Œuvrer pour des semences libres, biologiques et diversifiées.
Aujourd’hui, le monopole de certains industriels et l’homogénéisation
des semences appauvrit nos sols et nos alimentations ;
-
Valoriser une agriculture saine, sans toxiques :
-
Réduire d’ici 2030 l’utilisation des pesticides d'au moins 50% et des
engrais de synthèse, à commencer par les plus dangereux. Réduire aussi d’au moins 50%
l’utilisation d’antimicrobiens tels que les antibiotiques destinés aux
animaux d’élevage et à l’aquaculture. Accompagner tous les acteurs des
filières, renforcer le conseil et la recherche ;
-
Pas de mise sur le marché des nouveaux OGM. Nous demandons
l’application du principe de précaution sur ces nouvelles techniques
génomiques dont les impacts sont inconnus et non maîtrisés ;
-
Harmoniser par le haut les règles environnementales et
sanitaires
en Europe ;
-
Mettre en place un plan de transition de l'élevage vers des systèmes
biologiques, extensifs, à taille humaine et respectueux de la condition
animale :
-
Accompagner et financer la restructuration-diversification des
fermes et des filières. Soutenir les élevages pastoraux, herbagers et plein air. Adapter
les mesures de biosécurité aux élevages en extérieur ;
-
Lutter contre l’élevage intensif et garantir le respect du bien-être
animal
: Instaurer un moratoire sur toute nouvelle installation ou extension de
fermes-usines, c’est-à-dire les élevages de viande ou de lait à taille
industrielle. Ajouter une nouvelle conditionnalité à la PAC sur la
densité d'animaux pour que l'argent public ne vienne plus soutenir
l'élevage industriel. Assurer aux consommateur·ice·s de la transparence sur les
conditions d’élevage, de transport et d’abattage via un étiquetage
détaillé ;
-
Limiter les souffrances endurées dans les abattoirs et rapprocher
les différents lieux de vie et d’abattage des animaux d’élevage.
Rendre obligatoire l’utilisation de la vidéosurveillance pour lutter
contre les pratiques barbares. Améliorer le transport, l’arrivée et
l'attente des animaux avant abattage. Soutenir le maillage territorial
des abattoirs de proximité ainsi que l'abattage à la ferme. Faire
évoluer la réglementation vers l’abolition des autorisations
dérogatoires d’abattage sans étourdissement.
Une transition agroécologique et une souveraineté alimentaire dans les
territoires ultra-marins:
-
Réformer le POSEI et les soutiens publics à l'agriculture
pour privilégier l'agriculture biologique et les filières destinées au
marché local et à l’amélioration de la sécurité et souveraineté
alimentaire. Arrêter les aides couplées et mettre en place des
subventions par unité de main-d'œuvre.
-
Renforcer les dispositifs de commercialisation et transformation
locales
pour les territoires d’Outre-mer.
-
Reconnaître formellement l'agriculture familiale à petite échelle
et développer des dispositifs d’accompagnements spécifiques.
-
Renforcer le soutien par les fonds européens à l'agriculture dans les
PTOM
(Polynésie française, Nouvelle-Calédonie) en garantissant l'indépendance
de gestion des territoires.
-
Refuser l’autorisation des nouveaux OGM aux Antilles, qui entretiennent
la monoculture de la banane ou de la canne à sucre.
-
Sanctuariser les terres non polluées au chlordécone.
Soutenir d’autant plus fortement l’agro-écologie pour ne pas créer un
cocktail incontrôlable de toxiques sur ces territoires déjà victimes
majeures de la pollution au chlordécone.