Notre socle programmatique pour l'Europe

Sauver le climat et faire face à l'urgence sociale
avec un Etat providence écologique européen

Agriculture & pêche

Accompagner l’agriculture et la pêche dans la transition

Introduction

L’agriculture, les paysannes et les paysans, mais aussi la pêche, les pêcheurs et les pêcheuses sont les premier·e·s concerné·e·s par les conséquences du dérèglement climatique et de l’effondrement de la biodiversité. Ils et elles en sont aussi les premier·e·s lanceur·euse·s d’alerte. Sécheresses, températures extrêmes, maladies ou inondations impactent déjà les récoltes et les écosystèmes maritimes et terrestres. Les baisses de rendement pourraient aller jusqu’à 30% selon les estimations du Haut Conseil pour le Climat. Notre manière de produire doit changer pour assurer la résilience et la souveraineté de notre système alimentaire.

D’un côté, la politique agricole commune a été majeure dans la déstructuration et la destruction des systèmes alimentaires locaux, ici en Europe et aussi dans le reste du monde et notamment des Suds. De l’autre côté, la politique commune de la pêche laisse le champ libre à la pêche industrielle qui détruit les écosystèmes, excède ses capacités de renouvellement et menace la survie de la pêche artisanale. Pour une rémunération juste de leur travail, contre la précarité alimentaire, pour l’emploi dans nos territoires et un environnement protégé, nous proposons de changer du tout au tout notre modèle agricole, halieutique et alimentaire.

Les combats à mener lors de la prochaine mandature 👇

A- Mettre en place un nouveau pacte agricole

Tout le monde doit se rendre compte que quelque chose ne tourne pas rond dans le système actuel : on empêche les agriculteurs et agricultrices de vivre dignement de leur travail, on les met en concurrence avec le monde entier, la grande distribution et l’industrie se taillent la part du lion avec des marges de plus en plus importantes, l'inflation des produits alimentaires pèse sur les conditions de vie de celles et ceux qui avaient déjà du mal à joindre les deux bouts, la qualité de l'alimentation baisse, plus particulièrement pour les plus pauvres et, d'un autre côté, on voit que le gaspillage alimentaire continue.

L’agriculture subit le plus grand plan social depuis des années : le nombre d'exploitations agricoles dans l’UE a diminué de 40% entre 2003 et 2020 passant de 15 à 9 millions. Les subventions sont mal dirigées et les petites exploitations sont délaissées au profit de l’agrobusiness pour qui les performances financières et les coûts les plus bas sont les seuls objectifs. Les conditions de vie, les revenus, l’accompagnement et la protection accordée à nos éleveur·euse·s, agriculteur·ice·s sont dramatiques. Il est urgent de sortir de cette situation délétère. Il est urgent, aussi, de prendre des mesures qui leur assure une visibilité à long terme, pour leur permettre d’engager la transition sans peur de perdre leurs revenus.

La transition ne peut reposer uniquement sur celles et ceux qui produisent. La transition écologique de l'agriculture doit s'accompagner d'une transition de notre alimentation. Plus largement, cette transition doit être celle de l'ensemble des filières agricoles et impliquer tous leurs acteurs, de l'amont jusqu'en aval. Les politiques agricoles et alimentaires devront accompagner les transformations de ces secteurs, les mobiliser et les encadrer. Pour garantir la souveraineté alimentaire, l'Union européenne doit se doter d'une vraie démocratie alimentaire. C’est comme ça que nous pourrons avoir des productions de qualité. L’alimentation est l’affaire de tous et toutes, la politique agricole que nous mettons en place doit également impliquer largement l’ensemble des citoyens et citoyennes. Dans cette lutte, les Écologistes et agriculteur·ice·s poursuivent les mêmes objectifs, avec les mêmes exigences.

Nos mesures :
Une politique agricole juste et rémunératrice, qui permette à tous·tes les paysan·ne·s de vivre dignement de leur travail :
  • Mettre en place une PAC qui soutient l’emploi avec des subventions distribuées par unité de main-d'œuvre. Plutôt que de financer des hectares, la politique agricole commune finance les pratiques agricoles qui créent de l’emploi. 
  • Réintroduire des outils permettant la régulation par les prix, avec des prix planchers qui garantissent d'être au moins payé au prix de production.
  • Mettre en place un EGALIM européen pour renforcer les capacités de négociation des paysan·ne·s sur les prix, contenir et redistribuer les marges des transformateurs et de l’agro-industrie, lutter contre la concurrence intra-européenne et favoriser les circuits courts.
  • Fixer à la restauration collective des objectifs de produits végétaux, bio et locaux, tout en adaptant les règles européennes de la commande publique qui aujourd’hui ne permettent pas de mettre “local” dans un cahier des charges d’appel d’offres. Les commandes intérieures doivent soutenir ces objectifs de transformation agroalimentaire.
  • Diminuer les taxes sur certains produits comme les fruits et légumes et le bio, pour que les prix soient aussi cohérents avec le schéma alimentaire que nous souhaitons favoriser. Voir notre proposition d’instaurer une TVA verte (cf II.B.1. Mettre la politique économique au service de la transition).
  • Sortir des accords de libre-échange pour produire en Europe ce dont nous avons besoin :
    • Instaurer un principe de subsidiarité commerciale pour chercher à ne plus importer ce que l’on produit, ni exporter ce que les autres peuvent produire ;
    • Introduire des mesures-miroirs sur l’ensemble des réglementations sociales et écologiques européennes ;
    • Proposer une réforme ambitieuse de l’OMC qui permette de faire reposer le multilatéralisme non plus sur des logiques purement marchandes mais sur les droits humains et environnementaux notamment la souveraineté alimentaire (cf VIII.B. L’Union européenne, actrice de la paix dans le monde) ;
  • Protéger les paysan·ne·s des nouveaux risques avec l’assurance européenne face aux risques climatiques (cf VI.A.2. Assurer l'accessibilité des besoins essentiels pour tous·tes) et épidémiques.
Un plan pour accompagner et inciter à la transition agricole vers des pratiques plus écologiques:
  • Assurer la viabilité économique de ce nouveau modèle agricole :
    • Garantir une visibilité des revenus sur trois ans pour les agriculteur·ice·s  s’engageant dans la transition de leurs pratiques, notamment concernant la conversion en agriculture biologique ;
    • Mettre en place un Fonds de transition agricole permettant d’accompagner les paysan·ne·s dans leurs investissements pour des pratiques agro-écologiques, en particulier lors de la transmission des activités ;
    • Faciliter l’installation et la pérennisation en soutenant la mise en place d’un mécanisme de dotation (de carrière) où les paysan·ne·s qui s’installent en agro-écologie, ou convertissent leur exploitation, sont doté·e·s par un collectif citoyen et/ou par les collectivités d’une partie des moyens de production (ferme, terre, machine, bétail, etc). Mettre en place une Dotation Nouvelle Installation sans critère d'âge et ouverte aux salarié·e·s-associé·e·s des SCIC et SCOP pour favoriser toutes les installations agricoles ;
    • Rémunérer les bonnes pratiques écologiques, respectueuses du bien-être animal. Développer le paiement pour la protection des services écosystémiques pour la durabilité de la transition, en particulier en systématisant l'aide au maintien pour l'agriculture biologique ;
  • Développer de nouvelles filières pour la transition écologique grâce à une politique européenne volontariste :
    • Organiser la mise en réseau et son animation, le financement de la recherche et le soutien à l’investissement pour permettre la diversification des productions, le développement des protéines végétales, le soutien à la filière bio, la transformation des filières en ralentissement ; 
    • Œuvrer pour des semences libres, biologiques et diversifiées. Aujourd’hui, le monopole de certains industriels et l’homogénéisation des semences appauvrit nos sols et nos alimentations ;
  • Valoriser une agriculture saine, sans toxiques :
    • Réduire d’ici 2030  l’utilisation des pesticides d'au moins 50% et des engrais de synthèse, à commencer par les plus dangereux. Réduire aussi d’au moins 50% l’utilisation d’antimicrobiens tels que les antibiotiques destinés aux animaux d’élevage et à l’aquaculture. Accompagner tous les acteurs des filières, renforcer le conseil et la recherche ;
    • Pas de mise sur le marché des nouveaux OGM. Nous demandons l’application du principe de précaution sur ces nouvelles techniques génomiques dont les impacts sont inconnus et non maîtrisés ;
    • Harmoniser par le haut les règles environnementales et sanitaires en Europe ;
  • Mettre en place un plan de transition de l'élevage vers des systèmes biologiques, extensifs, à taille humaine et respectueux de la condition animale :
    • Accompagner et financer la restructuration-diversification des fermes et des filières. Soutenir les élevages pastoraux, herbagers et plein air. Adapter les mesures de biosécurité aux élevages en extérieur ;
    • Lutter contre l’élevage intensif et garantir le respect du bien-être animal : Instaurer un moratoire sur toute nouvelle installation ou extension de fermes-usines, c’est-à-dire les élevages de viande ou de lait à taille industrielle. Ajouter une nouvelle conditionnalité à la PAC sur la densité d'animaux pour que l'argent public ne vienne plus soutenir l'élevage industriel. Assurer aux consommateur·ice·s de la transparence sur les conditions d’élevage, de transport et d’abattage via un étiquetage détaillé ;
    • Limiter les souffrances endurées dans les abattoirs et rapprocher les différents lieux de vie et d’abattage des animaux d’élevage. Rendre obligatoire l’utilisation de la vidéosurveillance pour lutter contre les pratiques barbares. Améliorer le transport, l’arrivée et l'attente des animaux avant abattage. Soutenir le maillage territorial des abattoirs de proximité ainsi que l'abattage à la ferme. Faire évoluer la réglementation vers l’abolition des autorisations dérogatoires d’abattage sans étourdissement.
Une transition agroécologique et une souveraineté alimentaire dans les territoires ultra-marins:
  • Réformer le POSEI et les soutiens publics à l'agriculture pour privilégier l'agriculture biologique et les filières destinées au marché local et à l’amélioration de la sécurité et souveraineté alimentaire. Arrêter les aides couplées et mettre en place des subventions par unité de main-d'œuvre.
  • Renforcer les dispositifs de commercialisation et transformation locales pour les territoires d’Outre-mer.
  • Reconnaître formellement l'agriculture familiale à petite échelle et développer des dispositifs d’accompagnements spécifiques.
  • Renforcer le soutien par les fonds européens à l'agriculture dans les PTOM (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie) en garantissant l'indépendance de gestion des territoires.
  • Refuser l’autorisation des nouveaux OGM aux Antilles, qui entretiennent la monoculture de la banane ou de la canne à sucre.
  • Sanctuariser les terres non polluées au chlordécone. Soutenir d’autant plus fortement l’agro-écologie pour ne pas créer un cocktail incontrôlable de toxiques sur ces territoires déjà victimes majeures de la pollution au chlordécone.

B- Bien se nourrir : l’alimentation doit être traitée comme un impératif pour tous·tes

Alors que 60 millions de tonnes de nourriture sont gaspillées chaque année en Europe, certain·e·s ont toujours le ventre vide. Chez nous, ce sont près d’un tiers des Français·e·s qui n’ont pas les moyens d’une alimentation saine en quantité suffisante pour trois repas par jour. Pourtant, manger est un droit, reconnu depuis 1948 dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Comment alors, est-il possible que la France et l’Union européenne ne garantissent pas ce droit fondamental ?

Il est urgent de faire rimer le souci de la fin du monde avec celui de la fin du mois et que l'évolution des pratiques s’accompagne d’une évolution de la consommation, non pas comme une contrainte mais comme un bénéfice. Le contenu de nos assiettes doit changer pour être plus sain, plus copieux, moins carné, moins pollué, mieux aligné sur les besoins de celles et ceux qui produisent, plus respectueux des limites planétaires. 

Nos mesures :
  • Transformer la PAC en PAAC : Politique agricole et alimentaire commune. Derrière cette évolution, nous prônons un changement de conception plus large, considérant la nourriture comme un droit et pas seulement comme une marchandise. Il est donc nécessaire de penser ensemble la destination de la production et nos attentes qualitatives en amont. 
  • Mettre en place une loi cadre sur les systèmes alimentaires durables qui garantira le droit à l’alimentation pour tous·tes les Européen·ne·s et impliquerait l’ensemble des acteurs et actrices des filières agroalimentaires dans la transition. 
  • Généraliser les plans alimentaires territoriaux et leur mise en réseau via le programme LEADER pour favoriser la commercialisation en circuits courts et développer des entreprises de transformation alimentaire au plus près des territoires afin d'en améliorer l'autonomie alimentaire.
  • Faire en sorte que les consommateur·ice·s aient plus de visibilité sur leurs achats grâce à un étiquetage ambitieux, incluant le NutriScore et le “PlanetScore” - indications sur l’impact environnemental des produits. La transparence pour des capacités d’accès à une alimentation de qualité, respectueuse de l’environnement et du bien-être animal, doit être un droit garanti. 
  • Réformer l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) et procédures d’évaluation des produits, pour écarter immédiatement les pesticides dangereux.
  • Abaisser le seuil maximal de substances toxiques autorisées dans les produits de la mer, en s’alignant sur les recommandations scientifiques les plus protectrices.
  • Lutter contre le gaspillage alimentaire. 
  • Réduire notre consommation de produits animaux d'au moins 50% d’ici 2050 : soutenir les productions locales, biologiques, extensives et artisanales pour permettre une meilleure qualité, tout en allant vers une diminution de la consommation pour respecter les limites planétaires. Mettre en place un plan stratégique européen de soutien aux protéines végétales, aux légumineuses et aux cultures d’algues par exemple.
  • Instaurer une journée végétarienne européenne.
  • Coordonner une action commune pour mettre en œuvre des sécurités sociales de l’alimentation au sein des États membres, afin de garantir pour toutes et tous, le droit à une alimentation saine et durable en quantité suffisante (cf VI.A.1. Sécuriser les États providence européens).

C- Repenser en profondeur la politique de la pêche

L’océan est à bout de souffle, son rôle pour le climat et la biodiversité aussi, mais ce n’est pas tout : la politique de la pêche déployée par l’Union européenne, laisse libre cours à la destruction des écosystèmes au large de nos côtes comme de celles des États en développement, appauvrit la pêche réellement artisanale et les territoires côtiers, porte atteinte au bien-être des poissons. Au prétexte de protéger les « stocks halieutiques », la France applique les quotas de pêche en les attribuant toujours aux plus gros, à la pêche industrielle, plutôt qu’à celles et ceux qui font vivre l’emploi sur le territoire, limitent leurs émissions de CO2 et respectent les écosystèmes. Nous avons déjà emporté des batailles, comme sur la pêche électrique. Il nous est encore possible de remettre la pêche sur pied.

Nos mesures :
  • Mettre fin à toutes les aides publiques subventionnant une pêche destructrice (navires industriels et engins de fond mobiles).  A l’inverse, rediriger les subventions : 
    • Soutenir financièrement le développement de la pêche réellement artisanale plus respectueuse des ressources et emplois et nécessaire à notre souveraineté alimentaire ;
    • Accompagner les pêcheur·euse·s dans la transition pour adopter des pratiques plus respectueuses de l’environnement ;
    • Valoriser les circuits courts et la vente directe ;
  • Lutter contre la surpêche en fixant tous les quotas de pêche à des niveaux durables et en mettant en place la gestion écosystémique des pêches, c’est-à-dire sortir d’une approche mono-espèce et prendre en compte les interactions entre espèces et avec leur environnement pour fixer les quotas de pêche.
  • Instaurer une meilleure répartition des quotas de pêche pour lutter contre leur concentration par une poignée d'industriels, par une indexation sur critères sociaux et environnementaux et la priorité aux navires de moins de 12 mètres.
  • Accorder un accès exclusif sur la bande côtière aux navires de moins de 25 mètres, avec des droits de pêche prioritaires pour ceux équipés de moyens de pêche non destructeurs.
  • Dans les Aires marines protégées, interdire la pêche industrielle (méga-chalutiers) et l’utilisation du chalutage de fond. Cette limitation des impacts en zones prioritaires permettra à la fois de protéger les écosystèmes, de reconstituer les stocks de poissons et de redonner la souveraineté des eaux aux navires artisanaux.
  • Supprimer progressivement les chaluts de nos flottes. Cela sera permis par l’accompagnement financier au rééquipement des navires.
  • Diminuer au maximum l’incidence de l’aquaculture sur l’environnement. Limiter les traitements antibiotiques, privilégier les espèces de bas niveau trophique comme les poissons herbivores. 
    • Interdire les fermes-usines à poissons et autres usines aquacoles, qui concentrent les impacts ;
    • Soutenir le développement de la conchyliculture en améliorant l'accès au foncier sur la côte, en renforçant et en faisant appliquer les normes européennes sur la qualité de l'eau et en soutenant la décarbonation du secteur ;
  • Étudier et mettre en œuvre des méthodes d’élevage, de transport, d’insensibilisation et de mise à mort plus douces pour les poissons, tout comme il existe des législations sur les mammifères et les oiseaux.
  • Réformer les accords de pêche avec les pays du sud ; accords déséquilibrés qui pillent leurs ressources. Revenir sur les mécanismes permettant aux flottes européennes d’échapper aux contraintes réglementaires et fiscales internationales.
  • Revoir les labels, aujourd’hui outils de greenwashing (absence de traçabilité effective, problématiques majeures en matière de droits humains, etc). En cela, établir une méthodologie et des critères stricts pour les labels, dont le respect doit être évalué par une autorité indépendante des intérêts privés.